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Mamadou TRAORÉ (Master GESS, 2023) : la protection de l'enfance comme priorité

Portraits de diplômés

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27/03/2024

"On travaille à la carte - on ne traite pas de la même manière un enfant victime de violences et un jeune en décrochage scolaire – en s’appuyant sur un réseau de partenaires."


Après un parcours éclectique, Mamadou TRAORÉ (Master GESS, 2023) a trouvé sa vocation dans la protection de l'enfance. Récemment apparu dans le documentaire « Représenter » réalisé par Julian BLUM et Jonathan BOISSINOT, il revient sur son impressionnant parcours de vie.


Bonjour Mamadou. Pourriez-vous nous parler de votre parcours scolaire et professionnel ?

J’ai effectué plusieurs métiers dans ma vie : j’ai été agent à La Poste, prestataire dans des mariages, livreur, vendeur sur les marchés, agent de sécurité, etc. Puis, étant donné que j’ai grandi en quartier prioritaire de la ville (QPV), j’étais souvent en contact avec des Éducateurs de Prévention. Parmi eux, il y en avait un avec lequel j’ai particulièrement accroché. J’étais entraîneur de football pour les enfants et, un jour après un match, il m’a dit que j’avais une très bonne pédagogie et m’a proposé de travailler dans son milieu. Ainsi, l’idée de devenir Éducateur Spécialisé a commencé à faire son bout de chemin.

Dès lors, depuis 2010, je suis Éducateur Spécialisé. J’ai exploré toutes les facettes du métier : en foyer, dans la rue, en prévention spécialisée, en centre d’hébergement d’urgence, en IME, etc. Depuis 2019, je me suis spécialisé dans la protection de l’enfance au sein du département du Val-de-Marne (94). J’ai alors obtenu un diplôme d’Éducateur Spécialisé en VAE, puis j’ai bifurqué vers le Master GESS en formation continue en 2023.

 

Pourquoi avez-vous fait le choix de partir en formation continue, et plus précisément avec le Master GESS ?

J’ai l’une de mes anciennes collègues qui a réalisé le Master GESS en 2020. A ce moment-là, je souhaitais faire une formation dans le domaine du social et en accord avec mes valeurs. Ainsi, après diverses recherches, c’est finalement le Master GESS qui m’a le plus correspondu.

 

Aujourd’hui, en quoi votre métier vous anime-t-il au quotidien ?

C’est véritablement le fait d’accompagner les jeunes dans des situations sensibles et de les aider à s’en sortir. Je travaille sur tous les volets de la protection de l’enfance, sauf la délinquance. Mes collègues et moi accompagnons les enfants et leur famille dans le cadre de la loi. On essaye d’améliorer leur situation grâce à des outils éducatifs et pédagogiques en lien avec les problématiques rencontrées. On travaille à la carte - on ne traite pas de la même manière un enfant victime de violences et un jeune en décrochage scolaire – en s’appuyant sur un réseau de partenaires.

Pour le moment, je suis encore Éducateur Spécialisé mais c’est par choix. Je veux terminer ce que j’ai entamé avec les jeunes avant de changer de poste. Il est important de faire une transition en douceur pour leur éviter un nouveau sentiment d’abandon. En effet, avant même d’avoir fini le Master GESS, j’avais des propositions de poste mais j’ai préféré les décliner à ce moment-là. Je prendrai de nouvelles fonctions à la rentrée 2024.

 

"L’idée était de mettre en avant les quartiers populaires, mais également de montrer leur limite."


Pouvez-vous nous donner un exemple concret de vos actions ?

Je me suis occupé d’un jeune qui était totalement en décrochage scolaire. Situation difficile, une maman isolée avec 4 enfants en bas âge, bref de grosses difficultés. On a travaillé avec le jeune et la maman sur le fait d’envisager une séparation car on a décelé que chacun avait en fait besoin de son espace. On a alors placé l’enfant dans un lieu de vie, qui est une grande maison ou 4-5 jeunes sont accueillis mais qui ne fonctionne pas véritablement comme un foyer d’accueil classique. Depuis, le jeune s’est métamorphosé ! Il n’a loupé aucun jour d’école, a réalisé sa période de stage et a même repris 5 kg.

Seule ombre au tableau, si je puis dire, est qu’il a décidé de totalement rompre les liens avec sa mère. Cela lui a permis de trouver son équilibre mais à plus long terme, nous allons essayer de voir si une reprise de contact est possible.

 

Vous êtes récemment apparu au sein du documentaire « Représenter » réalisé par Julian BLUM et Jonathan BOISSINOT. Pourriez-vous m’en dire plus ?

J’ai plusieurs casquettes : Éducateur Spécialisé, Président d’une association et je suis également très engagé politiquement. Je me suis inscrit à l’École de l’Engagement, inspirée du modèle américain, qui offre aux personnes issues de classes populaires une formation sur tous les aspects de la politique (géopolitique, prise de parole, etc.). J’ai alors pu échanger avec un membre de la Banque Centrale Européenne, un député, un maire…

A l’issue de cette formation, j’avais pour souhait de mettre en place des petits déjeuners équilibrés gratuits au sein des écoles de ma ville. En effet, je mets au défi quiconque de travailler le ventre vide. A force de travail et de mobilisation, j’ai réussi à monter un partenariat avec l’Assurance Maladie et mettre alors en place mon projet. L’idée était de mettre en avant les quartiers populaires, mais également de montrer leur limite. Toute cette aventure a été filmée dans le documentaire de « Représenter ».

Le documentaire suit également une femme, Marie-Pierre, qui souhaite se présenter aux législatives. On y voit alors son cheminement ainsi que les difficultés qu’elle rencontre en tant que femme, mais aussi à cause du manque de réseau, problème auquel on peut être vite confronté lorsque l’on se lance en politique.

Le documentaire n’est pour le moment pas encore disponible sur les plateformes de streaming mais est parfois diffusé dans des petites salles de cinéma. Aussi, nous sommes en train de voir avec l’équipe du Master GESS pour le diffuser à l’Université.

 

Si l’on revient sur votre année à l’IAE Paris-Est, quel est votre souvenir le plus marquant du Master ?

Il y en a eu beaucoup car au sein de la promotion 2023, tout le monde se tirait vers le haut. Sans l’aide des autres, je n’aurais pas eu mon Master.

Quitte à choisir un seul souvenir, je dirais qu’il s’agit de la validation de mon diplôme après ma soutenance de mémoire. Rien n’a été simple, j’ai toujours continué et je n’ai rien lâché. A force de travail, on soulève beaucoup de barrières.

 

"L’obtention de mon Master m’a aussi permis de briser le plafond de verre."


Avec le recul, que vous a apporté le Master GESS dans votre carrière ou dans votre développement personnel ?

Sur le plan professionnel, le Master m’a apporté de la structure. Il est venu compléter des choses acquises et bonifier de manière factuelle des éléments que je connaissais déjà (finance, concepts, mobilisation des acteurs autour de nous, etc.). L’obtention de mon Master m’a aussi permis de briser le plafond de verre. Je ne serais plus confronté au fameux « Vous avez un profil intéressant mais vous n’avez pas le diplôme adéquat. ». Avant même de terminer le Master, on m’a proposé un poste cadre. Mon parcours est aussi un message pour les jeunes dont je m’occupe : j’ai repris mes études à 35 ans, preuve que tout est possible !

Au niveau personnel, ce fut une véritable aventure humaine. J’ai rencontré des gens des 4 coins de la France, cela m’a rassuré sur le fait que les gens savent et peuvent vivre ensemble. Cela va à l’encontre de ce que l’on entend dans les médias.

 

Pour finir, auriez-vous des conseils à donner aux personnes qui souhaiteraient s’orienter vers le domaine de l’ESS ?

Foncez ! Si les gens réellement intéressés par le social et qui ont encore des principes et des valeurs ne prennent pas leur place dans ce domaine-ci, elle sera prise par d’autres pas forcément si bien attentionnés. Souvent, on a un sentiment d’infériorité : « je ne suis pas à ma place en Master, en politique, dans la société… ». Or, pendant que l’on réfléchit comme tel, d’autres prennent notre place. En changeant d’échelle, on accepte que peu importe où l’on va, on sera à notre place et on réussira. On doit s’autoriser à faire des choses plus grandes.


Découvrez la bande-annonce du documentaire « Représenter » en cliquant sur son nom.

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